Création, IA et émotion
- Cécile Jaffrès
- il y a 3 jours
- 3 min de lecture
Cette fin d’année 2025 aura été marquée par un phénomène publicitaire inattendu : la publicité de Noël d’Intermarché, centrée autour d’un loup solitaire qui apprend à cuisiner pour être accepté à une fête de Noël, est devenue un véritable succès mondial. Ce court-métrage d’animation français a déjà été vu des centaines de millions de fois à travers le monde, suscitant admiration et discussions dans l’industrie créative.
Ce qui distingue profondément ce spot, baptisé « Le Mal-Aimé », c’est qu’il a été réalisé sans recourir à l’intelligence artificielle générative, à une période où de nombreuses campagnes publicitaires font appel à l’IA pour accélérer ou enrichir la production visuelle. Intermarché a volontairement misé sur une animation artisanale et made in France par une équipe de près de 70 artistes.

La publicité repose sur une narration authentique et une bande-son nostalgique (avec la chanson Le Mal Aimé de Claude François). L’histoire du loup (d’abord mal compris, puis accueilli grâce à sa transformation) fonctionne comme une métaphore sur l’acceptation, l’empathie et le désir d’appartenance, des thèmes universels donc.
Cette capacité à créer une connexion émotionnelle rappelle une idée souvent discutée dans les débats actuels sur l’IA en graphisme : même si les outils automatisés peuvent générer des images ou des visuels impressionnants, ils ne remplacent pas la capacité humaine à raconter une histoire significative et cohérente. Comme le souligne cet article de Webmarketing-Com, l’IA peut assister dans la production, mais elle ne remplace ni la sensibilité créative, ni l’intention stratégique qui donnent sens à une création visuelle.
En cette période de fin d'année, plusieurs grandes marques ont adopté des solutions basées sur l’IA pour leurs campagnes de fin d’année. Coca-Cola, par exemple, a diffusé une version de sa publicité de Noël utilisant plus que largement des outils génératifs. Selon des retours d’internautes et de professionnels du marketing, ces spots ont plutôt été perçus comme moins cohérents, moins chaleureux et dépourvus de véritable profondeur émotionnelle, certaines critiques allant jusqu’à parler d’un rendu « sans âme », malgré les capacités techniques utilisées.
Cette opposition met en lumière une réalité discutée par de nombreux graphistes et communicants : l’intelligence artificielle est un outil, mais elle ne doit pas être confondue avec la créativité humaine elle-même ; ce sont les idées, le sens et la narration qui suscitent l’émotion chez le public.
Le succès d’Intermarché montre plusieurs points importants pour les créatifs et les communicants :
L’histoire compte plus que l’outil. Une idée originale, bien pensée et exécutée avec soin touche souvent davantage qu’une production rapide générée automatiquement.
L’émotion reste un levier puissant. En période de fêtes, les publics cherchent des récits qui résonnent avec leurs valeurs, pas seulement des visuels spectaculaires.
L’IA est une aide, pas une solution magique. Elle peut optimiser certaines étapes, mais elle ne remplace pas l’intelligence, l’intention et la sensibilité humaines, comme le rappellent les débats actuels sur l’IA en graphisme.
Pour les graphistes, les directeurs artistiques ou les communicants ainsi que leurs clients, ce succès est donc un rappel précieux : la créativité n’est pas une question d’outil, mais de perspective, d’émotion et de narration :des qualités que même les technologies les plus avancées ne peuvent pas simuler pleinement sans une vraie intention humaine. Du moins pour le moment !

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